Des chercheurs évoquent une corrélation entre l’usage de TikTok et certains tics compulsifs chez des adolescents. Sans en être responsable, le réseau social pourrait accentuer le phénomène chez les plus vulnérables.
Ces derniers mois, un nombre inquiétant de jeunes femmes à travers le monde ont indiqué souffrir de tics, qu’ils soient vocaux ou corporels. Les médecins qui les ont suivies ont fini par leur trouver un point commun: l’utilisation du réseau social TikTok. Ce phénomène, documenté dès Octobre 2021, inquiète de plus en plus car il ne faiblit pas, relève le Wall Street Journal.
Depuis sa montée en popularité, le réseau social TikTok est devenu un espace d’expresion où de nombreux adolescents parlent librement de leurs maladies, de leurs handicaps ou de leur souffrances. Parmi ceux-ci, quelques utilisatrices et utilisateurs décrivent leur vie quotidienne avec le syndrome de la Tourette.
Ce trouble neuropsychiatrique provoque des tics soudains, à la fois vocaux et corporels, se traduisant parfois par des gestes brusques ou des expressions à caractère insultant.
Un syndrome populaire
Certaines personnalités des réseaux sociaux atteintes de cette maladie sont très influentes, à l’image d’Evie Meg, une jeune américaine connue sous le pseudo “thistrippyhippie”. Sa popularité, qui a rapidement bondi sur TikTok, semble avoir participé à la visibilisation de cette maladie: aujourd’hui, elle est suivie par 14.2 millions de personnes.
Le nombre de visionnages de vidéos étiquetées par le mot-clé #tourettes a augmenté de près d’un milliard depuis octobre 2021, période à laquelle les premières alertes des médecins ont fusé. Ce 31 mars, il cumule 5.7 milliards de vues.
Des tics à l’origine inconnue
Selon le Wall Street Journal, “les médecins continuent de voir un nombre disproportionné de filles souffrant de tics” depuis plusieurs mois.
Un neurologue américain affirme ainsi que dans son hopital, un enfant sur 8 venu à l’hôpital en 2021 a montré des signes de tics compulsifs, contre moins d’un sur 50 en 2019.
Les médecins qui suivent ces adolescents ont fini par établir un lien entre le visionnage de ces vidéos et les tics nerveux développés, en majorité chez les filles, sans toutefois leur diagnostiquer un syndrome de la Tourette. Il s’agit de tics vocaux et corporels anormaux, mais non liés à une maladie neurologique.
L’une des théories avancées par les recherches effectuées sur ce phénomène met en avant l’idée selon laquelle les jeunes femmes affectées par ces tics étaient déjà victimes de troubles psychologiques, notamment liés aux confinements ou encore à des difficultés scolaires passées.
Une étude publiée dans une revue australienne traitant des troubles pédiatriques, parue le 5 mars, fait un lien entre ces tics et la présence de troubles psychiatriques non diagnostiqués, de l’automutilation ou encore de l’échec scolaire. Elle pointe également du doigt l’influence non négligeable du réseau social.
“Ces dernières années, les tics compulsifs ont été rendus “populaires” et “tristement célèbres” par plusieurs célébrités de TikTok […] et YouTube. Les mêmes phrases et mots injurieux utilisés par certains patients atteints de tics suggèrent la forte influence des médias sociaux chez ces patients, ainsi que la “contagion” et la “suggestibilité” de ce problème”, résume l’étude.
L’algorithme du réseau social a déjà été critiqué pour enfermer les utilisateurs dans des thèmes parfois néfastes, une situation d’autant plus grave lorsqu’elle touche des personnes psychologiquement vulnérables.
L’influence des réseaux sociaux
Comme le note le Wall Street Journal, les médecins indiquent que l’influence de TikTok sur le développement de ces tics n’est pas une première. Les réseaux sociaux sont régulièrement accusés d’accentuer les problèmes psychologiques des jeunes publics, par exemple chez les personnes souffrant de troubles du comportement alimentaire. Ils font par ailleurs l’objet d’auditions devant le congrès américain à ce sujet.
TikTok a toutefois entrepris, dans certains cas, de proposer de l’aide à ceux qui feraient des recherches sur certains sujets tels que le suicide ou l’anorexie mentale. Pour cela, le réseau social les dirige vers des pages officielles proposant de la documentation ainsi qu’un soutien.
Pour comprendre et encadrer le problème, TikTok a également indiqué s’être tourné vers des experts, rapporte le Wall Street Journal. Une porte-parole de la plateforme indique que ces derniers n’ont pas identifié de relation directe entre les tics et le réseau social.
“La plateforme permet aux personnes atteintes du syndrome de la Tourette de s’exprimer librement, de trouver une communauté et de combattre la stigmatisation”, a-t-elle indiqué.