Le prix de la tomate a fait polémique, plusieurs raisons à cela pour Aderdour : sécheresse, prix des intrants ou encore intermédiation.
Sur les marchés nationaux, le prix de la tomate a parfois atteint des prix très inhabituels. A cette occasion, Lahoucine Aderdour, président de la FIFEL, s’est confié sur cette augmentation tout en demandant la restructuration des marchés. Une interview très complète réalisée par Maroc-Hebdo-Press.
« Pourquoi les prix des fruits et légumes ont-ils augmenté vertigineusement ces derniers jours?
Lahoucine Aderdour : La hausse des prix est indéniable et surtout très forte. La tomate est actuellement vendue par les agriculteurs à 5 ou 6 dirhams le kilo dans les marchés de gros, contre 2 ou 3 dirhams il y a quelques semaines. Le manque d’eau constitue la première raison de cette évolution. La tomate et autres produits maraîchers dépendent des réserves en eau, et la sécheresse a fait que beaucoup de producteurs ont arrêté l’irrigation.
La potasse, très utilisée dans ces cultures, est passée de 6 à 17 dirhams le kg
À cela s’ajoute la baisse des températures durant les derniers jours du mois de février et la première semaine du mois de mars, ce qui entrave la récolte car la tomate n’a pas pu mûrir suffisamment. Sans oublier la hausse des coûts, notamment les engrais. La potasse, très utilisée dans ces cultures, est passée de 6 à 17 dirhams le kg, ce qui n’est pas sans impacter le prix des produits agricoles. Mais j’insiste tout de même que l’eau constitue le plus grand problème.
Le ministère de l’agriculture envisage de limiter les exportations pour maîtriser les prix à l’intérieur, notamment pour la tomate …
Lahoucine Aderdour : Il faut savoir qu’il existe deux catégories de producteurs agricoles. Ceux qui sont exclusivement inscrits dans le cadre du programme d’export et n’alimentent pas le marché marocain. Cette première catégorie est constituée de professionnels qui sont largement plus résilients et mieux préparés à affronter les défis actuels.
L’agriculteur vend une caisse à légume à 10 dirhams, puis une heure après, et sur le même marché, un intermédiaire la revend à 20 ou 30 dirhams. C’est inconcevable.
Quant à la deuxième catégorie, formée de petits et moyens agriculteurs, elle oriente la majorité de sa production au marché intérieur tout en consacrant une partie moins importante à l’export. Cette seconde catégorie est brutalement impactée par les problèmes actuels, et donc les prix continueront de dépendre de ces paramètres. Il existe aussi des vendeurs intermédiaires qui ne sont pas forcément des producteurs eux-mêmes, mais qui profitent de la flambée des prix à l’international pour acheter leur production aux agriculteurs pour l’exporter. Je tiens à préciser que le prix à l’export est passé de 0,5 à 1,7 euro (5,4 à 18,3 dirhams à peu près) pour le kg. C’est une aubaine pour eux, malheureusement, mais tout cela se fait de manière légale.
Y aura-t-il une baisse prochainement?
Lahoucine Aderdour : Si les températures montent dans les prochains jours, la récolte s’améliorera et les prix vont repartir à la baisse relativement. Mais le problème de l’eau persiste toujours. Sans oublier le rôle des intermédiaires dans la hausse.
Justement, comment remédier à cela?
Lahoucine Aderdour : Il faut absolument se pencher sur la restructuration des marchés de gros pour assurer une meilleure organisation. C’est une revendication que nous mettons sur la table depuis des années déjà.
L’agriculteur vend une caisse à légume à 10 dirhams, puis une heure après, et sur le même marché, un intermédiaire la revend à 20 ou 30 dirhams. C’est inconcevable. Les pouvoirs publics sont en train de construire quatre nouveaux marchés dans les différentes régions du Maroc, d’une superficie de 60 hectares chacun en moyenne, où les produits seront commercialisés de manière moderne, avec emballage et traçabilité garantie. Cela permettra aussi de réduire le parcours entre producteurs et consommateurs, ce qui est un défi très important. »