38 C
Marrakech
mardi 29 juillet 2025

Best Selling BLOG and MAGAZINE

Thème of All Time

Experience the change!

Publicité gauche
Publicité gauche
Accueil Société La réforme de la Moudawana 2025

La réforme de la Moudawana 2025

0
34

La nouvelle version du Code de la famille marocain a-t-elle réellement rétabli les droits de la femme ?

Entretien avec Me Achraf Aoulasse, avocat au barreau de Tanger

Par Nada.M, journaliste à L’Essentiel Info

Dans le cadre des réformes législatives que connaît le Maroc, la Moudawana (Code de la famille ) a été révisée pour intégrer plusieurs amendements majeurs. Objectif : renforcer les droits des femmes et moderniser l’organisation de la vie familiale. Maître Achraf Aoulasse, avocat au barreau de Tanger, décrypte pour nous les principales nouveautés, les enjeux de leur mise en œuvre et les réactions qu’elles suscitent.

La polygamie strictement encadrée

Selon Me Aoulasse, la nouvelle mouture de la Moudawana limite fortement le recours à la polygamie. Celle-ci n’est désormais autorisée qu’en cas d’exception : stérilité de l’épouse ou maladie chronique empêchant la vie conjugale.

« Le consentement de la première épouse ne suffit plus », précise-t-il. « Le juge doit
impérativement vérifier les conditions objectives avant d’autoriser un second mariage. »

Cette approche reflète une volonté d’adapter la loi aux évolutions sociales, dans un contexte où la protection des droits des femmes est devenue une priorité nationale.

La garde et l’autorité parentale : vers une parentalité partagée

L’un des changements notables concerne la garde des enfants. Désormais, ce droit est partagé entre les deux parents, que ce soit pendant ou après le mariage.

« Ce partage vise à garantir l’intérêt supérieur de l’enfant, tout en permettant aux deux parents d’exercer pleinement leur rôle », explique Me Aoulasse.

Il souligne toutefois les obstacles rencontrés dans la pratique, comme les tensions post-divorce ou la difficulté pour certains parents à voir leurs enfants, notamment après un remariage.

Le travail domestique enfin reconnu

Autre avancée majeure : la reconnaissance du travail domestique comme une contribution à la richesse familiale.

« Cette mesure accorde une vraie valeur au travail des femmes au foyer », affirme Me Aoulasse. « Elle leur donne désormais un droit légitime à une part du patrimoine familial acquis durant le mariage, même si elles ne travaillent pas à l’extérieur. »

Il s’agit, selon lui, d’un pas important vers plus d’équité et de justice sociale.

Héritage et âge légal du mariage : des évolutions prudentes

Sur la question de l’héritage, Me Aoulasse précise que l’égalité entre hommes et femmes n’est pas encore atteinte. Néanmoins, il salue la mesure qui exclut le domicile conjugal de la succession, protégeant ainsi la veuve du risque d’expulsion.

Concernant l’âge légal du mariage, il est désormais fixé à 18 ans sans exception, sauf décision judiciaire spéciale, restreinte à des cas très particuliers. L’objectif est de lutter contre les mariages précoces.

Mariage et divorce : vers des procédures plus simples

La réforme prévoit aussi des procédures simplifiées pour la régularisation des mariages contractés à l’étranger, ainsi qu’un délai strict pour trancher les dossiers de divorce.

Selon Me Aoulasse, cela « contribuera à réduire les souffrances émotionnelles des familles et à fluidifier le travail des juridictions. »

Défis du système judiciaire : surcharge et besoin de moyens

Malgré les avancées sur le papier, Me Aoulasse met en garde contre les limites de l’application pratique.

« Les tribunaux sont surchargés, les juges débordés, et les moyens humains restent insuffisants », dit-il. Il plaide pour un renforcement des ressources et une meilleure formation des acteurs judiciaires pour que les réformes produisent leurs effets.

Pas de rejet direct, mais des réticences d’ordre idéologique

Interrogé sur les réactions à cette réforme, Me Aoulasse affirme qu’aucune opposition frontale ne s’est exprimée. Toutefois, il reconnaît l’existence de réticences latentes, liées à des motifs idéologiques, religieux ou politiques.

« Ce ne sont pas des refus déclarés, mais des résistances ancrées dans des arrière-pensées ou des lectures conservatrices du droit. »

Un appel à l’information et au dialogue

Enfin, Maître Achraf Aoulasse appelle les citoyens et citoyennes à s’informer sur le contenu réel de la réforme.

« Il est essentiel de comprendre que ces mesures visent avant tout à protéger la cellule familiale, à assurer la dignité de la femme et à préserver l’intérêt de l’enfant. »

Il insiste également sur l’importance du dialogue ouvert, dans le respect des valeurs de la société marocaine.

Les réformes introduites dans la Moudawana de la famille en 2025 s’inscrivent dans un long processus historique que le Maroc a engagé pour la protection des droits des femmes. Depuis des siècles, le Royaume s’est distingué par une lecture modérée et équilibrée du droit de la famille, conciliant les principes de la Charia avec les réalités sociales.

À l’époque contemporaine, et sous l’impulsion royale, le Maroc a poursuivi ses efforts pour renforcer la place de la femme au sein de la famille et de la société, à travers des réformes successives visant à garantir sa dignité et ses droits.

La Moudawana 2025 ne constitue donc pas seulement une avancée juridique, mais elle reflète aussi une continuité dans les valeurs marocaines de justice et d’équité. Elle marque un pas de plus vers une société plus équilibrée, où la femme est respectée non seulement en tant que sujet de protection, mais aussi comme actrice à part entière du développement.


poup

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici